17 décembre 2011

Wu Lyf, Go Tell Fire To The Moutain




"Wu quoi ?" "Mais qu'est-ce que c'est que ce nom ?" "C'est vraiment un groupe ?". Voilà les 3 phrases qui reviennent le plus lorsque j'entreprends de parler de mes nouveaux chouchous de la scène actuelle. Alors, Wu Lyf, qu'est-ce que c'est ?

Pour commencer, WU LYF est l'acronyme de World United Lucifer Youth Foundation. Tout un programme ! Ce jeune quatuor nous arrive tout droit de Manchester et nous a offert en juin 2011 un brûlot des plus surprenants. La formation comprend un organiste/chanteur (oui, l'organiste c'est le monsieur qui joue de l'orgue), un guitariste, un bassiste et évidemment un batteur. Souhaitant s'entourer de mystère, le groupe a joué avec les médias tout au long du processus de production de l'album. Et encore aujourd'hui, leurs interventions télévisées sont souvent chaotiques. Ces jeunes garçons ne s'en sont jamais expliqués. Tout ce remue ménage provient de leur "fondation". Pour en savoir plus, consultez leur site. En échange de 15 euros, vous recevrez un vinyle, un bandana au motif du groupe et un contrat à signer "à l'encre noire" vous consacrant membre de "fondation". Si ce lot passe plus pour une édition collector auprès des fans, le groupe lui semble extrêmement sérieux. J'admets que leurs motivations m'échappent encore. Il s'agirait d'un rejet du monde capitaliste, pour créer un Etat qui oscillerait entre communisme et anarchie. Mais trêve de plaisanterie, passons à l'album !

Tout d'abord, il faut savoir que leur effort a été enregistré la nuit dans une église désaffectée. Ceci peut expliquer le son "en retrait" et peu puissant. J'ai mis quelques temps à m'y faire, mais une fois ce désagrément passé, j'ai pu vraiment rentrer dans cet album. Et j'avoue ne toujours pas en être sorti ! Quelle claque ! Quelle émotion ! C'est un véritable moment de bravoure ! Wu Lyf se fraie un chemin dans le bruit et la fureur, se love dans le solennel religieux grâce à son orgue et se jette dans des transes hystériques, tout en maintenant un aspect pop grâce au guitariste qui plante avec ses triades un son plutôt chaud et réconfortant. Vous aurez bien besoin de ces interventions pour sortir de la torpeur instaurée par le chant de Sir Robert. Celui-ci semble mourir à chaque mot qu'il prononce. Peut-on même parler de chant ? Il crie, sans pour autant imiter le chanteur de métal égorgeur de porcs. Ce cri est beaucoup plus sincère. Ce jeune homme a peur. Cette peur est parfaitement retranscrite sur les bandes. Les morceaux en deviennent alors touchants. La section rythmique elle se niche plus dans un registre afropop des plus entraînants. Cela faisait quelques temps que je n'avais pas entendu des lignes de basses aussi ravageuses. La batterie quant à elle, d'apparence simpliste, se révèle extrêmement riche. Les roulements caractéristiques risquent de devenir la marque de fabrique du groupe. Pour revenir au chant, une petite anecdote a été retranscrite par le groupe au cours d'une interview. Les voisins de l'église ont appelé un soir la police car ils entendaient ce qui semblait être les cris d'un homme qui se faisait torturer. Au final, ça n'était que Robert qui se chauffait la voix pour enregistrer ses parties. Cette simplicité et cette humanité dont regorge l'album sont frappantes. Les textes quant à eux se révèlent riches, cyniques, noirs et dénonciateurs. C'est tout notre monde que Wu Lyf remet en cause. Il n'y a qu'à jeter un coup d'oeil au texte de Dirt : "The fire starts / Can you hear the sound ?/ Of the kids all calling' / I won't hold this crown / Mum and Dad / Look what you done to me / I was your baby boy / Now watch me bleed."

Ces "4 paumés" comme ils se définissent réussissent un véritable tour de force. A partir de rien , ils livrent un album humain, original, monstrueusement bon, mystérieux et abrupt. Cependant, s'il ne fallait retenir qu'un seul qualificatif, mon choix se tournerait vers le terme violent. Comment mieux définir l'impact de Dirt ? Le final de Cave Song ? Ces morceaux vous rentrent dedans, vous habitent pour longtemps. L'apothéose est atteinte sur We Bros, dont "la foule" scande déjà le refrain. Au milieu d'un chaos militaire savamment orchestré par la batterie, ce qui semble être un millier de choeurs vient répéter deux simples mots : "We bros". On imagine déjà les salles de concerts se soulever pour reprendre avec le groupe cet hymne.

S'il fallait trouver un défaut à ce CD, je dirais que malheureusement, en fonction de votre humeur, il peut se révéler banalement répétitif. Il est vrai que l'omniprésence de l'orgue, du chant hurlé et des arpèges aigus de la guitare peut lasser. Cependant, depuis combien de temps un groupe n'avait pas réussi à se démarquer à ce point, en livrant un album unique ? Face à la "popisation" des groupes actuels, Wu Lyf prenait un risque, en tentant l'incursion du côté du mystique, du malaise, du malsain et du religieux. Toutefois, le pari semble réussi. Ils ont été la coqueluche des festivals estivaux européens. Ils ont été ensuite programmés à la Cigale en tête d'affiche du festival des Inrock et rempliront en mars leur propre Bataclan. On s'y retrouve ?

Liens :

Site officiel : http://www.wulyf.org/

Morceau "We Bros" : http://www.youtube.com/watch?v=5HGgni1nGGY

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